Communications
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CENTRE DE RÉFÉRENCE
Première journée nationale des centres C-MAVEM
La première journée nationale C-MAVEM des centres de référence Chiari et malformations vertébrales et médullaires rares, faisant partie de la filière « santé maladies rares » NeuroSphinx au sein du Ministère de la santé a eu lieu le 6 mars 2020. On était juste avant le début du confinement lié à la Covid-19, ce qui fait qu’on y pensait tous avec un peu de crainte. Apaiser S&C était représentée par Mado, Christian et plusieurs adhérents. L’ensemble des 22 conférences ont été enregistrées et les vidéos sont disponibles sur le site C-MAVEM à cette adresse.
C’est notre fidèle « reporter » Gérard Paquot qui nous fait un compte rendu de cette dernière journée « en présentiel »… nous ne savions pas que nous devrions attendre bien longtemps avant de nous revoir.
La matinée avait pour thème : « Qualité de vie et symptômes : nouvelles thérapeutiques » et l’après-midi : « Malformations versus anomalies du développement ». Les présentations du matin avaient un caractère volontairement ouvert à tous, alors que l’après-midi était très technique et s’adressait plus particulièrement aux spécialistes du corps médical. Chaque milieu des deux demi-journées a été ponctué par un « Forum d’échanges avec les patients » où les professionnels ont répondu aux questions des patients et associations de patients. Pour notre association, Mado, notre présidente a présenté les questions des patients pour les deux forums et a également fait deux présentations.
Vu le nombre de présentations, il est difficile de faire ici le résumé de toutes : que les intervenants m’en excusent ! Je vais plutôt revenir sur celles qui impactent directement nos deux pathologies. Le Professeur Attal a ouvert la matinée par un exposé sur les « Nouvelles approches thérapeutiques des douleurs neuropathiques ». Elle a immédiatement précisé qu’il y avait de très nombreuses étiologies dans les douleurs neurologiques. Les douleurs sont fréquemment très importantes et la prise en charge est essentiellement pharmaceutique, souvent sans grand résultat notable. Il est important d’être suivi dans une structure adaptée. Plusieurs études sont en cours, avec des résultats prometteurs ou intéressants, comme l’injection de toxine botulique pour les douleurs périphériques, ou la rTMS (stimulation magnétique transcrânienne répétitive) qui est une approche non invasive. L’acupuncture et l’hypnose peuvent aussi être tentées. Si 250 centres de traitement de la douleur existent en France, les délais pour un premier rendez-vous restent trop longs, souvent plusieurs mois.
Mado a ensuite présenté « l’engagement d’APAISER S&C dans le projet d’expérimentation du cannabis thérapeutique ». Le sujet avance, mais pas aussi rapidement que le souhaiteraient les malades, remplis de douleurs et qui fondent un espoir sur cette médication. Apaiser S&C est porteuse des besoins des patients vis-à-vis de la rTMS et du cannabis thérapeutique, mais aussi pour toutes actions sur les douleurs neurologiques. Mado fait alors le point sur l’avancement du dossier (Ministère de la santé, ANSP — Agence Nationale de Santé Publique —, Assemblée Nationale…). Elle précise que pour le cannabis thérapeutique, il pourrait y avoir cinq indications retenues dont les douleurs réfractaires aux thérapies classiques et la spasticité. Il a été formé un groupe de réflexion de 23 membres dont 6 associations de patients, parmi lesquelles APAISER S&C, représentant l’Alliance Maladies Rares (AMR). L’objectif principal est d’évaluer en circuit réel la prescription, la délivrance et le suivi de la dispensation. L’objectif second est d’évaluer le résultat dans diverses indications. L’inclusion devrait se faire sur un ensemble de 3000 patients de différentes pathologies.
Le Pr. Attal reprend la parole pour une communication sur « Cannabis et expérimentation ». Elle indique que nous avons beaucoup de données sur le sujet, mais que nous ne pouvons pas, à ce jour, conclure sur leur efficacité. Onze études sont en cours sur la douleur. Il n’est retenu actuellement en France que les douleurs neuropathiques réfractaires aux premières thérapies (médicamenteuses). La mise en place est en cours, avec un examen sur les critères d’inclusion et de non-inclusion des patients. L’Israël et le Canada ont une très grande avance sur nous. En France, il sera constitué un registre sur les patients et l’efficacité de manière systématique (3000 patients dont 700 en douleurs neuropathiques). Il n’y aura pas d’essai clinique, donc pas de placebo. Ce n’est pas l’objectif, seules les procédures de prescription et de distribution sont prises en compte.
Le Pr Amarenco (Hôpital Tenon, AP-HP) et le Dr Peyronnet (CHU Rennes) ont fait une communication sur les « Modalités de surveillance des neuro vessies : certitudes et points d’ombre ». Le Pr Amarenco en fera une seconde sur les « Nouveautés thérapeutiques dans la prise en charge des vessies neurologiques secondaires aux malformations médullaires : le présent et les perspectives ». (Voir l’article spécifique à suivre).
Lors du forum d’échanges avec les patients, les associations présentes ont transmis un ensemble de questions auxquelles les professionnels de santé ont répondu. Elles tournaient autour du cannabis thérapeutique, des troubles sphinctériens, de la paralysie des intestins pour les malades de syringomyélie et également « les fausses routes » et problème de déglutition chez certains patients.
L’après-midi fut surtout consacrée à des communications très techniques s’adressant essentiellement aux professionnels de santé, spécialistes dans ces domaines. On peut toutefois évoquer le Pr. Zérah sur le « Chiari de l’enfant : Malformation et/ou maladie évolutive. Quel avenir à l’âge adulte ? ». Il précise que si on n’intervient pas pour certaines malformations de Chiari de l’enfant, bon nombre d’entre eux ont progressivement une régression du Chiari de type 1 et/ou de la syringomyélie. Remodelage avec le temps, mais pas systématiquement. On a aussi des malformations de Chiari qui, associées à des hormones de croissance, ont disparu. En revanche, il n’existe aucun article dans la littérature sur le suivi de cohorte d’enfants opérés ou non opérés, à très long terme.
Mado, dans l’après-midi a présenté « Les Maux sur les Mots : série de clips d’informations sur la syringomyélie et le Chiari ». Elle a présenté le projet des 10 clips dont la durée sera un peu plus longue qu’initialement. L’ensemble est validé par le centre de référence du Kremlin-Bicêtre. Leurs finalisations étaient prévues pour fin 2020 mais l’arrivé de la Covid19 a généré un retard important. La projection du clip de présentation de l’ensemble a été applaudie. Merci à Mado et à tous les participants d’APAISER S&C à ce projet.
Présentation : LES VESSIES NEUROLOGIQUES
Lors de la première journée nationale C-MAVEM des centres de référence Chiari et malformations vertébrales et médullaires rares, deux communications ont traité des problématiques des vessies neurologiques, ainsi que du suivi médical, consultables via ce lien.
Il est apparu lors de ces deux conférences, mais beaucoup le savent, que les affections de Chiari et syringomyélie, ainsi que les chirurgies qui peuvent en découler, ont souvent des impacts au niveau sphinctérien (urinaire ou ano-rectal). Ces deux communications ont mis en évidence certaines problématiques. Il était donc intéressant d’en faire un résumé ici. Le Pr Amarenco (Hôpital Tenon, AP-HP) et le Dr Peyronnet (CHU Rennes) ont communiqué sur les « Modalités de surveillance des neuro-vessies : certitudes et points d’ombre » et les « Nouveautés thérapeutiques dans la prise en charge des vessies neurologiques secondaires aux malformations médullaires : le présent et les perspectives ». Si elles étaient orientées Spina-Bifida, elles s’appliquaient aussi à nos pathologies. De ces deux présentations, on peut en tirer de nombreuses informations et enseignements.
Dr Peyronnet / Modalités de surveillance des neuro-vessies :
La surveillance de ces neuro-vessies dans le cadre de ces maladies rares s’impose, avec les problèmes auxquels nous sommes confrontés. Ce travail doit être pluridisciplinaire : urologue, neurologue, neuro-urologue et chirurgien. Il faut une surveillance de ces neuro-vessies parce qu’il y a des enjeux en qualité de vie, mais aussi sur le plan néphrologique. Elle est aussi inhérente au fait que la vessie neurologique vieillit.
Les neuro-vessies médullaires présentent un risque de haut régime de pression vésicale entrainant une remontée et une atteinte du haut appareil urinaire, avec un risque élevé d’insuffisance rénale. Infection urinaire et pyélonéphrite sont multipliées par 50, avec un risque important de calculs rénaux ou de cancer (vessie et reins) pour des malades atteints de Spina-bifida, mais aussi pour des patients opérés de Chiari et de syringomyélie.
Pour contrer cela, les spécialistes se sont mis d’accord sur un régime de surveillance régulier :
— Échographie réno-vésicale tous les ans ;
— Bilan annuel de la fonction rénale ;
— Bilan urodynamique (BUD) tous les 1 à 2 ans si facteurs de risques, particulièrement présents, chez les patients en fauteuil (selon l’Association européenne d’urologie / 2018, il doit être régulier, mais à individualiser en fonction du patient) ;
— Cystoscopie et cytologie urinaires tous les 1 à 2 ans si facteurs de risque.
Ces bilans doivent être adaptés à chaque patient et revus régulièrement (vieillissement de l’appareil urinaire). Chaque patient est singulier. Traiter les patients dans des centres experts multidisciplinaires.
La créatininémie n’est pas très fiable, car elle dépend de la masse musculaire. Pour les patients sous auto-sondage ou sondage à demeure, la bactériurie asymptomatique est présente dans quasi 100% des cas. Il est nécessaire de ne traiter qu’en cas de fièvre ou de modification des symptômes.
Et demain ? Surveillance des neuro-vessies : biomarqueurs urinaires ? radiomique (utilisation de l’intelligence artificielle pour analyser des milliers d’image de scanner) ?
Pour le Dr Peyronnet tous ces examens n’empêchent pas en urologie de prendre le temps et d’interroger le patient. Le professeur Amarenco souligne l’intérêt de la collaboration multidisciplinaire, de l’écoute du patient, de l’apport des associations et de l’éducation thérapeutique dans la réflexion pour une prise en charge optimale du patient.
Pr. Amarenco et Dr Peyronnet / Nouveautés thérapeutiques dans la prise en charge des vessies neurologiques :
L’introduction du Pr Amarenco donne une définition résumée et imagée des vessies neurologiques « La vessie neurologique, soit elle est un peu paralysée et ne se vide pas bien et elle est hypoactive, soit elle se contracte trop et c’est la vessie hyperactive ».
La définition d’une vessie hypoactive, c’est une vessie qui ne se contracte pas beaucoup, qui ne se vide pas beaucoup. Cette définition est sous-tendue par une urodynamique, soit parce qu’elle ne se contracte pas, soit par un obstacle à la vidange, soit par une pathologie neurologique entrainant une déconnection de centres neurologiques. Grâce aux bilans urodynamiques, on a des index mathématiques permettant de dire quelles en sont les causes. A côté des pathologies neurologiques, on peut avoir d’autres étiologies pouvant entrainer des vessies hypoactives. Quel que soit l’étage lésionnel (central, encéphalique, médullaire, système nerveux périphérique), on peut avoir une hypoactivité de la vessie.
Quels sont les impacts ? Quand on a du mal à vidanger, on va pousser et on risque un reflux au niveau des reins mais également un résidu après la miction donc un risque d’infection et une dégradation de la statique périnéale. Cette vessie hypoactive a donc aussi des enjeux néphrologiques.
Quels sont les traitements ? Éliminer les épines irritatives, traiter les impacts fécaux dont la constipation, éliminer les anomalies comme les ongles incarnés, injecter de la toxine botulique au niveau du sphincter, mettre en place un régime d’autosondage, poser un stent urétral au niveau de la prostate, utiliser la neuromodulation (électrique), penser aux traitements du diabète s’il est en cause, et à la prescription de différents types de médicaments d’efficacité très moyenne. Le standard reste aujourd’hui l’autosondage intermittent. Un message important est la nécessité de la prise en compte des troubles anorectaux qui ont un impact sur la vessie, avec l’irrigation transanale et la neuromodulation. Il est parfois difficile de déterminer si c’est un problème de contraction ou d’obstruction, d’où le besoin de travail conjoint entre urologue et neurologue.
La définition d’une vessie hyperactive se caractérise par une hyperactivité détrusorienne (le détrusor est la paroi interne de la vessie), des troubles de la compliance (la compliance étant le rapport entre la contenu de la vessie et la contenance) créant un régime de haute pression vésicale : une vessie hyperactive se contracte involontairement, avant d’être complètement pleine, et provoque des envies soudaines et inconfortables d’uriner qui peuvent être incommodantes (envie pressante d’uriner, besoin d’uriner plus de huit fois par période de 24 heures, besoin d’uriner la nuit (deux fois ou plus), pertes accidentelles d’urine (« incontinence urinaire d’urgence »), fuites urinaires.
En neuro-urologie, on a des médicaments, en particulier depuis les années 1980, les anticholinergiques, puis depuis fin des années 1990, les injections détrusoriennes de toxine botulique au point de devenir des standards, mais ils n’ont été que très peu évalués pour les patients de type C-MAVEM, y compris en termes d’AMM (Autorisation de Mise sur le Marché). On constate une efficacité sur une partie des patients, mais moindre que pour d’autres atteintes médullaires. L’augmentation des doses ou l’accumulation de médicaments anticholinergiques entrainent une augmentation du risque qui doit être contrôlé et surveillé par l’urologue (effet cognitif). Il ne faut pas être paniquant, mais vigilant. On a une classe pharmacologique plus récente avec les β3-mimétiqes qui sont des stimulateurs sympathiques, sans les effets indésirables des anticholinergiques.
À nouveau, le message du besoin d’un suivi multidisciplinaire est rappelé.